Via Crucis di San Leonardo da Porto Maurizio

San Leonardo è a Via Crucis

Missionnaire et prédicateur franciscain né le 20 décembre 1676 à Porto Maurizio (aujourd’hui Imperia, Ligurie), San Leonardo est considéré comme un des plus grands missionnaires de son siècle. Déplaçant à lui de nombreuses foules par la ferveur de son discours, appelant à l’expiation des péchés et à la piété chrétienne, il provoquait régulièrement des scènes de repentance et conversion collectives.

Jusqu’à sa mort en 1751 il n’aura de cesse d’opérer des missions, allant pieds nus par vœu de pénitence à travers toute l’Italie, notamment la Toscane, l’Etat Pontifical, les Marche, l‘Ombrie, le règne de Naples, la Ligurie, la Corse, l’Emilie-Romagne.

Via Crucis di San Leonardo.

Il sera le plus grand propagateur du Chemin de Croix, la Via Crucis, aussi bien dans les églises franciscaines que dans les autres églises. Il en érigera ainsi presque 600, habituellement en conclusion de chacune de ses missions. Il œuvrera également à sa codification et à son officialisation dans l’ensemble du monde chrétien.

Le 27 décembre 1750, Fra Leonardo officiera la première Via Crucis célébrée dans le Colisée de Rome. Cette sainte tradition se maintiendra jusqu’à nos jours puisque chaque Vendredi Saint, le Pape officie personnellement cette cérémonie dévotionnelle, sur les bases immuables des quatorze stations instaurées par Fra Leonardo.

San Leonardo in Corsica

C’est en 1744, à l’âge de 68 ans que Fra Leonardo est appelé à opérer une grande mission en Corse, suite à la demande du sénat génois faite au Pape Benoît XIV. En effet la République de Gènes, à bout de ressources et ne parvenant pas à maîtriser les populations corses, décide de faire appel à la religion et à son « homme providentiel » de l’époque. 

San Leonardo face una cunversione in Corsica.
L. Massabo - Basìlica S. Maurizio, Imperia.

Dans une situation économique déjà déplorable, un état d’immense misère sociale et une absence totale de justice et de paix civile, la Corse accable encore davantage l’administration génoise par un nouveau souci : les Corses se rebellent contre l’autorité, veulent secouer le joug génois et intriguent auprès de certaines puissances étrangères. 

En effet, depuis 1729 fait rage la guerre d’indépendance, opposant les insurgés corses aux troupes françaises alliées à celles de Gènes. En 1735, ils ont déclaré la séparation définitive de la Corse d’avec Gènes, et proclamé un nouvel état placé sous la protection de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie. En 1739, après la défaite de Théodore de Neuhoff 1er Roi des Corses, les chefs de l’insurrection sont condamnés à l’exil, notamment Luigi Giafferi et Ghjacintu Paoli. Cette période de victoire relative est donc propice à une tentative de reprise en main de l’île de la part de Gènes. 

Il est clair que le sénat génois attend de Fra Leonardo qu’il persuade les Corses de rester des sujets dociles de la Sérénissime, le chemin de la vertu étant aussi et surtout celui de l’obéissance. Mais il apparaît également que le père n’est nullement préparé à s’occuper de problèmes politiques en y débarquant, et que c’est avec une certaine répugnance qu’il sera amené à le faire. 

« Qui ne fréquente pas de près ces populations ne peut connaître leur tempérament, qui est de soufre, également enclin au mal et au bien. » Fra Leonardo à propos des Corses, 17 août 1744.

La situation qu’il trouve dans l’île n’a visiblement rien de comparable avec celle du proche continent : Dans chaque pieve qu’il traverse, des factions d’hommes en armes s’opposent et s’entretuent dans des vindette finissant par mêler l’ensemble de la population. Chaque jour nouveau porte son lot d’assassinats. Les pires atrocités sont perpétuées aux victimes, sans distinction de sexe ni d’âge.   

Mettant toutes ses forces et tout son courage dans la quête pour obtenir dépôt des armes, renoncement à la vengeance, déclaration de paix et de réconciliation, il ne tardera pas à s’apercevoir que seule l’anarchie dans laquelle vivent les populations est responsable de la dégradation de leur moralité et, en particulier, de la recrudescence effrayante de ces homicides. 

D’une sincérité évidente et d’un amour réel pour les populations, il n’aura de cesse de réclamer aux autorités génoises une justice forte, sévère et impartiale pour la Corse, ce en quoi il ne sera pratiquement pas entendu. 

Bien que considérée comme une grande réussite par la baisse substantielle des vindette et actions violentes de tous genres, la mission de Fra Leonardo en Corse n’aura en définitive que peu d’influence sur la suite des événements. Il nous en reste aujourd’hui un élément incontournable de notre patrimoine : le rite de la Via Crucis, accompagné de ses chants propres, qu’il a essaimé à travers toute la Corse.

• Via Crucis di San Leonardo
• 01. Introitu è Stazioni I à IV (Mimi Gambotti).
• 02. Introitu. « L’orme sanguigne »
• 03. Prima stazione. « Cor mio crudele »
• 04. Stazione X. « Angeli, voi »
• 05. Stazione XI. « Ver me ti volgi »
• 06. Stazione XII. « Il sol si oscura »
• 07. Stazione XIII. « Deh, Madre pia »
• 08. Stazione XIV. « Dal tuo sepolcro »

Comme illustration sonore, nous avons choisi un extrait de l’enregistrement original de Mimi Gambotti, qui nous a transmis ce patrimoine dans sa version propre à notre région, puis des passages de certaines stations en situation, lors de la cérémonie que nous avons reconstitué le 29 mars 2014 à u Silvarecciu.

Strada facendu

La mission de Fra Leonardo en Corse, prévue initialement pour couvrir l’ensemble du territoire insulaire se limita finalement à la partie nord-est de l’île et ne dura que quelques mois de l’année 1744. Une mauvaise chute du père dans une maison de l’Isulaccia di Fiumorbu le condamna à rejoindre précipitamment le siège épiscopal à Cervioni, pour s’embarquer vers Bastia, puis Gènes. 

Les missions se déroulaient généralement aux abords du couvent de chaque pieve où Fra Leonardo et ses compagnons étaient hébergés. Une grande estrade était élevée au pied de laquelle une foule nombreuse venait s’y amasser pour assister aux cérémonies durant plusieurs jours. En cas d’inimitié majeure, Fra Leonardo pouvait se rendre personnellement dans une localité pour tenter de faire revenir la paix. Enfin, les villages avoisinants étaient visités pour y ériger dans l’église la Via Crucis.   

Voici les différentes missions de Fra Leonardo en Corse, ainsi que les lieux attestés de son passage :

• Mission au Diocèse de Mariana, 21-26 mai. Couvent des pères Réformés de Mariana (u Borgu). Bastia, Vignale, a Vulpaiola, Scolca. Accueil des populations d’u Borgu et Lucciana.
• Mission en pieve di Casinca, 31 mai-9 juin. Couvent des pères Réformés de Casinca (u Viscuvatu). Accueil de la population d’a Venzulasca.
• Mission dans les pieve di Casacconi et Ampugnani, 14-24 juin. Couvent S. Antone Abbate des Servites de Marie (a Casabianca). Ficaghja, Castel d’Acqua. 

À cette occasion, il a lui-même érigé le Chemin de Croix des églises paroissiales de Silvarecciu, Casalta, Pianu, selon la déclaration du pape Clément XII. 

• Mission en pieve d’Orezza, 29 juin-7 juillet. Couvent des pères Réformés S. Francescu d’Orezza (Pedicroce). 
• Mission en pieve di Tavagna, 12-20 juillet. Couvent des pères Réformés S. Francescu de Tavagna (Talasani). 
• Mission en pieve di Rustinu, 25 juillet-2 août. Couvent S. Antone des pères Observants de Rustinu (Merusaglia). 
• Mission en pieve di Caccia, 8-16 août. Couvent des pères Observants de Caccia. Castiglione, Omessa.
• Mission en pieve di Niolu, 23-30 août. Couvent des pères Réformés (Calacuccia).
• Mission à Corti, 4-13 septembre 1744. Couvent des pères Observants de Corti (citatella). Venacu, Nuceta, Ruspigliani.
• Mission à Vezzani, 20-27 septembre. Ghisoni, Lugu di Nazza, Poghju di Nazza, Prunelli di Fiumorbu. 
• Mission à l’Isulaccia di Fiumorbu, 4-8 octobre. Fra Leonardo se blesse dans une chute. U Petrosu, Vezzani, Altiani, Pedicorti, Zuani, Matra, Moita, a Petra di Verde, Cervioni, Bastia. 
• Embarquement à Bastia pour Gènes, 18 novembre. 

Liste dressée par S. Léonard des lieux en Corse
où il a érigé le Chemin de Croix. 

Bibliographie :
- Diario delle missioni di San Leonardo. (Opere complete di s. Leonardo da Porto Maurizio missionario apostolico, minore riformato del Ritiro di S. Bonaventura in Roma riprodotte con alcuni scritti inediti in occasione della sua canonizzazione per cura dei pp. Minori Riformati del Ritiro dell'Incontro presso Firenze fondato dal suddetto santo : Volume V. Venezia 1869).  
- Chemin de la Croix, Guide d'une Religieuse, Résolutions; Par le bienheureux Léonard de Port-Maurice. H. Casterman - 1860.
- Corse Historique No 9-10 - 1963 - Aspect politique de la mission du père Léonard de Port-Maurice. Pierre Lamotte.